C’est une immense architecture de verre et de béton, une forme en H — peut-être pour Hôpital — avec une sorte de rue centrale et couverte qui ressemble à l’espace d’une station spatiale futuriste.
Ouvert en 2000, l’hôpital du troisième millénaire est, en quelque sorte, le produit de la fermeture de trois hôpitaux : Broussais, Laennec et Boucicaut.
Jean-Noël Fabiani et moi-même avons été promus à la tête du grand département de chirurgie cardiaque. Tous deux, nous avons guidé le déménagement de Broussais à Georges-Pompidou. Il a fallu tout boucler, et surtout assurer le lancement d’un secteur clé du nouvel établissement. Pendant près de dix mois, nous avons tout vérifié, accomplissant de multiples exercices à blanc : simuler les temps opératoires sur des mannequins, reproduire les complications éventuelles, tester de faux malades sur informatique, pratiquer des quantités d’examens pour déterminer la marge d’erreur.
Fini l’hôpital conçu en petits pavillons entourés de jardinets, oubliés les vieux ensembles rénovés et restaurés, véritables lieux d’histoire et de mémoire. À Georges-Pompidou, tout est ouvert, décloisonné, fluide. Place au bois, aux tonalités acidulées entre bleu et jaune, aux matériaux futuristes étanchés et faciles à entretenir.
Certains n’hésitent pas à taxer le bâtiment de gigantisme, mais avec ses huit cent vingt-sept lits, cet hôpital est de taille moyenne si l’on se place à l’échelle européenne : l’hôpital de Munich aligne trois mille lits, celui de Milan deux mille cinq cents.
Chaque matin, mon premier geste consiste à allumer l’ordinateur… L’irruption de l’informatique bouleverse le mode de prise en charge des patients, le stockage des images et des radios. Le logiciel gouverne les rendez-vous et les conséquences de cette informatisation se révèlent parfois surprenantes, avec des examens prévus dans le passé ou, au contraire, renvoyés à un futur très éloigné. Je possède mon code secret pour accéder au dossier de chacun de mes opérés. La circulation de l’information se fait rapide, efficace. Je peux transmettre tout le dossier à un autre hôpital, converser en ligne avec un médecin du bout du monde… Les courriels transmis d’un clic remplacent téléphones et entretiens.
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