C’est un pays, et ce n’est pas un pays. Dès l’arrivée à l’aéroport de Pristina, je suis cueilli par le drapeau rouge frappé de l’aigle noire. Bienvenue au Kosovo ! Un pays, vraiment ? Avec ses deux millions d’habitants (un peu plus qu’à Marseille !) et une reconnaissance internationale chaotique ?
Nous sommes en Europe, et nous ne sommes pas en Europe. L’euro s’est imposé, mais le Kosovo a des allures de tiers monde, avec un taux de chômage qui explose à 40% de la population active, une pauvreté endémique, des infrastructures délabrées.
Pourtant, nous sommes ici au cœur du continent. Moi, je me sens surtout au cœur de l’Histoire. Dans ce pays à l’écrasante majorité musulmane, je songe à l’invasion ottomane du xive siècle, à la poudrière des Balkans qui fit chavirer l’Europe au début du xxe, au régime communiste imposé par Tito pour unifier la Yougoslavie, à la guerre avec la Serbie. Et je retrouve mon ami Bernard Kouchner : sa photo est omniprésente. Dans les hôtels, dans les restaurants, partout. Le héros local ! L’homme qui, à l’entrée dans le xxie siècle, a administré le pays au nom de l’Onu.
Pristina, victime de cette Histoire, reste une ville triste et grise. Un repaire pour les corbeaux qui viennent ici picorer poubelles et détritus.
L’Hôpital de la capitale est à l’image du pays : morne et dégradé. Tout manque et de nombreux appareils ne fonctionnent plus. Le budget alloué couvre à peine les frais de chauffage !
En trois heures d’avion, je suis passé de ma cathédrale technologique de l’Hôpital européen Georges-Pompidou à cette désolation. Ici, on souffre avant tout du froid qui s’engouffre dans les chambres par les carreaux brisés ! La médecine est bien malade. Les enfants cardiaques ne sont pas soignés sur place, faute de structure. Un système bien rôdé évacue systématiquement les petits en danger vers la France, l’Allemagne ou les États-Unis.
Grand projet avec le gouvernement kosovar : créer un hôpital pour les enfants cardiaques. Nous devons le construire. Demain, avec l’aide de la communauté internationale, les enfants pourront se faire opérer chez eux.
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